Lourdement sanctionné en 2017 par l’Éducation nationale pour avoir fait étudier la Bible à ses élèves, un instituteur du Berry vient d’être réhabilité par la justice. Matthieu Faucher se déclare aujourd’hui «soulagé», même si «un tel gâchis administratif et humain aurait pu être évité depuis le début grâce à un dialogue». Dans un jugement du 10 juillet dernier, le tribunal administratif de Limoges a qualifié de «disproportionnée par rapport aux faits reprochés» la sanction qui avait frappé en 2017 ce professeur des écoles de l’Indre. Et a ordonné sa réintégration dans son école d’origine, à Malicornay, dans un délai de deux mois.
Le trentenaire avait été suspendu de ses fonctions par le rectorat d’Orléans-Tours pour «faute grave professionnelle», muté dans une autre école du département, à Issoudun, puis affecté à de nombreuses missions de remplacement. Pourquoi? Via un courrier anonyme, des parents du village où il exerçait l’avaient accusé de prosélytisme religieux. Face à l’inculture manifeste de ses élèves, l’homme s’était inscrit dans une démarche «d’étude historique, culturelle, philosophique et littéraire», conforme aux programmes de l’Éducation nationale, en abordant avec sa classe de CM1-CM2 certains aspects de la «mythologie chrétienne, fondement de notre civilisation».
L’instituteur avait prévenu les parents
Dans un cours sur le fait religieux, il avait notamment fait étudier à ses élèves des passages du livre de l’Exode ou celui de l’Évangile concernant la femme adultère, pour un total de sept heures d’enseignement sur une année scolaire. Il avait aussi fait visionner des extraits du film L’Évangile selon saint Matthieu , considérés comme «inappropriés» par son supérieur hiérarchique, le directeur académique. Le tribunal administratif a annulé la sanction, considérant que l’enseignement était «dépourvu de tout prosélytisme», comme l’ont soutenu de nombreux témoignages de parents d’élèves. Matthieu Faucher avait par ailleurs prévenu les parents qu’il utiliserait des extraits bibliques, projet qui n’avait fait l’objet d’aucune opposition. Enfin, «le nombre d’heures d’enseignement consacrées à cette étude était modeste», note le tribunal.
S’être cantonné à la religion chrétienne
La sanction avait par ailleurs été prise par le rectorat sans que l’enseignant soit incité au préalable à modifier son cours. Enfin, tous les témoignages d’élus locaux et de parents d’élèves, sans parler des rapports d’inspection de l’enseignant, «relèvent de manière constante ses grandes qualités professionnelles», note le tribunal, qui nuance toutefois son jugement. Pour la juridiction, si les principes de laïcité et de neutralité de l’Éducation nationale «ne font pas obstacle à l’utilisation d’un document à caractère religieux dans le cadre d’un enseignement portant sur le fait religieux», c’est cependant «sous réserve que cette utilisation soit adaptée à l’âge des élèves». Or les juges considèrent, vu le jeune âge de ces élèves, que la mise en perspective des textes n’était pas tout à fait appropriée. Et reprochent à l’enseignant de s’être cantonné à la religion chrétienne. Bref, il y a bien eu faute, mais une faute qui ne méritait pas une sanction aussi grave.
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