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Modification météo : quand la Chine ambitionne de faire la pluie et le beau temps

Pékin a annoncé, début décembre, vouloir donner un coup d'accélérateur à son programme de "modification météorologique". Peu connu, il s'agit pourtant d'un effort sans comparaison dans le monde pour mener les nuages à la baguette.

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De "l'apprenti sourcier" au "roi de la météo". La Chine a annoncé, début décembre, son intention d'étendre à très grande échelle ses programmes de "manipulations météorologiques", rapporte le South China Morning Post, vendredi 11 décembre. Elle veut pouvoir faire essentiellement la pluie et un peu le beau temps sur plus de 5,5 millions de kilomètres carrés, soit plus de la moitié du pays, d'ici à 2025. À l'heure actuelle cet effort ne concerne "que" 3 millions de kilomètres carrés.

Les ambitions chinoises de devenir les maîtres de la météo ne sont pas nouvelles. Le monde les avait découvertes lors des JO de 2008, lorsque Pékin avait affirmé avoir notamment utilisé des "technologies d'altération" des nuages pour s'assurer que la cérémonie d'ouverture des jeux se déroule sous un ciel parfaitement bleu.

560 000 manipulations météos

Mais à cette époque, la Chine n'en était déjà pas à ses premières expérimentations en la matière. Mao Zedong, le père de la Chine communiste, en a jeté les fondations à la fin des années 1950. C'est à son initiative qu'une première expérience de pluie provoquée, aux résultats difficilement quantifiables, a été menée en 1958 dans la province de Jilin, au nord du pays, qui venait de vivre sa pire période de sécheresse en soixante ans.

La Chine s'est officiellement dotée d'un programme de "modification météorologique" en 2002. Depuis lors, le pays a mené "plus de 560 000 manipulations [météos] en lançant des roquettes et des projectiles, ce qui a permis de faire tomber 489,7 milliards de tonnes de pluie, soit l'équivalent en eau de trois fois le contenu du barrage des Trois Gorges", avait annoncé Zheng Guoguang, le directeur de l'Autorité météorologique chinoise, en 2012.

Plus de 50 000 Chinois travaillent actuellement à cet effort national pour contrer les aléas de la météo. Le très officiel Bureau des modifications météorologiques "a dépensé plus de 230 millions d'euros depuis 2008 pour développer l'infrastructure nécessaire, mener les campagnes de modification météorologique et investir dans la recherche et le développement de ces technologies", a résumé Wolfgang Gasser, un chercheur en géo-ingénierie à l'université technique de Munich, dans une étude des techniques de "manipulations météorologiques" publiée en 2017. D'autres études estiment que le montant total des investissements dépasserait même le milliard d'euros.

Pékin n'a pas lésiné sur la dépense, car "la Chine est l'un des pays les plus touchés par les catastrophes naturelles et 70 % d'entre elles sont d'ordre météorologiques", expliquait l'Académie chinoise des sciences météorologiques dans une présentation de ce programme national en 2013. Parmi ces dernières, ce sont les sécheresses qui ont le plus coûté au pays, encore très dépendant de son agriculture et dont les besoins en eau potable ne cessent d'augmenter, rappellent les auteurs de cette présentation.

Moins de grêle, plus de soleil

Et les techniques de modification météo cherchent, avant tout, à faire pleuvoir. C'est l'ensemencement des nuages : des composés chimiques, comme l'iodure d'argent sont envoyés dans les cumulus où ils attirent la vapeur d'eau et la transforme en cristaux. Du coup, ces nouvelles particules deviennent trop lourdes pour rester dans les nuages et tombent du ciel en se transformant en pluie à mesure que l'air se réchauffe.

Ces mêmes procédés peuvent aussi prévenir les tempêtes de grêle qui sont un problème récurrent, notamment dans le sud de la Chine. En l'occurrence, l'ensemencement est censé accélérer les précipitations, ce qui empêche la formation de grosse billes de grêles.

Enfin, la Chine "utilise de plus en plus la manipulation météorologique pour éviter le mauvais temps lors des grands événements", soulignent trois chercheurs taïwanais qui ont étudié les aspects politiques de ce programme dans un article publié en 2017. Le Bureau météorologique chinois a même édicté, en 2015, des règles à suivre pour avoir le droit de recourir à ces techniques lors d'événements locaux ou nationaux. Il faut notamment que plus de 1 000 personnes assistent à la manifestation qui doit, en outre, avoir une valeur économique, culturelle ou politique évidente.

La Chine n'est pas seule

Autant d'éléments qui font que "la Chine est clairement le pays au monde le plus actif dans ce domaine", souligne le chercheur allemand Wolfgang Gasser. Mais il n'est pas le seul. L'ensemencement des nuages a débuté aux États-Unis en 1947 sous l'impulsion, comme souvent, de l'armée. Les Américains ont cru jusque dans les années 1980 qu'ils pourraient résoudre tous leurs problèmes météorologiques grâce à cette technologie. "Mais l'enthousiasme s'est largement réduit depuis lors et il n'y a plus aujourd'hui que neuf États qui mènent des opérations d'ensemencement des nuages", rappelle Wolfgang Gasser dans son étude.

Le problème pour les Américains est que l'efficacité réelle de cette technique n'a jamais vraiment été prouvée. "Le succès d'une opération peut difficilement être mesuré, car on ne sait jamais ce qui se serait passé s'il n'y avait pas eu d'ensemencement", écrit le chercheur allemand.

Des doutes scientifiques qui font aussi que l'Europe ne s'y est pas non plus intéressée de très près. "Les seules initiatives viennent de la communauté civile avec des expériences menées par des associations en Allemagne et en Autriche depuis la fin des années 1960", souligne Wolfgang Gasser.

En revanche, les Émirats arabes unies veulent y croire. Ils ont lancé en 2010 un programme doté d'un budget de 11 millions de dollars pour mener des expériences d'ensemencement des nuages. Le but affiché est d'augmenter les précipitations annuelles de plus de 15 %.

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Lien : https://www.france24.com/fr/%C3%A9co-tech/20201211-modification-m%C3%A9t%C3%A9o-quand-la-chine-ambitionne-de-faire-la-pluie-et-le-beau-temps?fbclid=IwAR0p51xz2VOxyHCwB1j58u-BIrm_yyXp6G1V5brvJdiCrpXXua

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